Je garde toujours un très beau souvenir de ce jour qu’habituellement on appelait la Toussaint. Quand j’étais petite, après le repas familial composé de choux rouges aux marrons et de la traditionnelle torche aux marrons, cette excellente pâtisserie alsacienne, la promenade digestive nous emmenait vers le cimetière. Là nous retrouvions oncles, tantes, cousins, cousines pour faire le tour des tombes de la famille. Nous nous arrêtions d’abord devant celle des grands parents et arrières grands-parents, puis celle de notre tante morte à 21 ans de la tuberculose alors qu’elle venait de se marier, et celle de l’ami de la famille qui est tombé d’une échelle, et d’autres encore. Devant chaque tombe bien fleurie, l’un ou l’autre racontait l’histoire de la vie du défunt puis à tour de rôle, nous trempions le rameau de buis dans l’encensoir et décrivions le signe de croix sur le monument.
Pour moi, c’était un moment joyeux parce qu’on retrouvait la famille et en même temps c’était un moment solennel et profond lorsque nous évoquions la vie et la mort de chaque défunt, même et surtout ceux que je n’avais pas connus. Ce rituel traditionnel permettait de ne pas oublier les morts, et de garder ce lien d’amour, d’amitié ou d’affection quelles qu’aient été leurs attitudes au cours de leur vie.
Monique Desfours